dimanche 2 octobre 2011

Energie nucléaire : par ici la sortie !

Un article de Libération :

Energie nucléaire : par ici la sortie !

Avenir . L’association négaWatt a imaginé un scénario qui exclut le recours à l’atome, misant sur la sobriété et l’efficacité énergétiques.

Par LAURE NOUALHAT






Prenez date. Le 15 août 2033, les amateurs de questions énergétiques sont conviés à un pique-nique géant face à la centrale de Civaux (Vienne). Ce jour-là, on fermera le dernier réacteur nucléaire français… C’est avec un brin d’humour que les experts de l’association négaWatt (nW) publient aujourd’hui leur exercice de prospective énergétique pour 2011-2050. Et ils y ont logé une bombe : la date théorique de sortie du nucléaire français.

Avec ce document, la France dispose d’un scénario qui s’appuie sur le triptyque sobriété-efficacité-énergies renouvelables. Le sujet fleure bon le débat atomique. Mais négaWatt est loin d’être un repère de beatniks antinucléaires, au contraire. Ces centaines d’experts n’ont pas eu besoin de Fukushima pour se lancer dans l’anticipation énergétique : ils œuvrent toute l’année au sein de cabinets d’études spécialisés dans les domaines de l’énergie, des transports ou des bâtiments.

Chauffage. C’est leur troisième livraison depuis la création, en 2001, de l’association. Comme le négawatt (nW) est le watt que l’on ne consomme pas, le scénario du même nom ne peut que démarrer par une chasse au gaspi de grande envergure. Quel que soit le service énergétique (chaleur, mobilité ou électricité spécifique), les scénaristes traquent les gisements d’économies d’énergie. Et il y en a partout. «Au final, les Français ne consommeraient pas moins, mais mieux», précise Thierry Salomon, président de nW. «Pour satisfaire les besoins de la société française, et ce malgré une population en augmentation de 15%, il faudrait fournir 2,2 fois moins d’énergie en 2050.» Un beau défi.

Rien que dans le secteur du bâtiment - qui représente 40% de notre consommation énergétique -, quatre cinquièmes de l’énergie sont consacrés aux usages liés à la chaleur, qu’il s’agisse du chauffage, de l’eau chaude ou du recours à la climatisation. Nombre d’habitants par logement, surfaces… tout est bon pour agir sur les consommations énergétiques du secteur. En imposant, par exemple, le retour à la température légale de 19°C dans tous les logements (une différence de 1°C entraîne une variation de 13% des besoins en chauffage). En agissant sur les usages liés à l’électricité (éclairage, bureautique, électroménager… soit 8% de notre consommation finale d’énergie), les experts affirment que l’on peut réduire drastiquement la consommation électrique : «La consommation moyenne peut passer de 2 900 kWh/an en 2010 à 1 500 kWh/an en 2050.»

Voilà pour la sobriété, place à l’efficacité. Toujours dans le secteur des logements, le scénario nW propose un programme massif d’isolation pour le parc immobilier ancien. «Environ 750 000 logements à rénover par an.» A l’horizon 2020, 95 millions de m2 auront alors fait l’objet d’une rénovation thermique afin de diviser par quatre les besoins moyens en chauffage. «Le gain est considérable, explique Thierry Salomon. La consommation d’énergie finale pour la chaleur et l’eau chaude serait globalement divisée par 2,3 en 2050. Cela représente 400 terawattheures, soit l’équivalent, en énergie, de toute la production électrique de notre parc nucléaire actuel.» En isolant mieux les bâtiments et en optimisant nos usages électriques, on peut, en théorie, fermer toutes les centrales françaises. Evidemment, «à terme, il faudra abandonner le chauffage électrique par convecteurs, fioul ou bonbonnes de gaz, et miser sur l’injection de biogaz».

«Viande». Loin d’être une obsession, la sortie du nucléaire n’est qu’un aspect de ce scénario qui aborde tous les domaines de la vie avec une grille de lecture énergétique. Ainsi, il préconise la modification du régime alimentaire, plutôt énergivore, des Français : «Le régime alimentaire de 2050 comprend 50% de viande en moins et beaucoup moins de lait.» Une fois nos besoins énergétiques réduits au minimum, reste une demande incompressible que les experts en négawatt espèrent combler à 100% avec les énergies renouvelables.


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